L’avantage du Projet IPP qui est le plus important et en même temps le plus controversé depuis le début de nos travaux en 2006, est qu’avec lui la fraude deviendra extrêmement dangereuse. Le crime ne payera plus.

Nous escomptons même que, après quelques années, l’on ne trouvera plus dans les pays ayant adopté notre projet aucun expert-comptable, banquier, avocat fiscaliste ou notaire qui se risquerait à conseiller son client dans cette tentative, et que même dans un paradis fiscal les professionnels, y compris les fameux Overseas Financial Services, prendront de plus en plus leurs distances quand ils seront sollicités.

le Projet IPP sera forcément appliqué un jour

Il vous suffit de visiter la situation à mi-2017 du contrôle budgétaire de l’Etat français pour vous en rendre compte. Vous y verrez que nos dépenses progressent plus vite que nos recettes, et que nous continuons à ne pas maîtriser notre déficit. Ceci tandis que tous nos budgets régaliens (éducation, santé, défense, sécurité, justice…) craquent de partout et que le service (capital et intérêts) de notre dette publique risque encore de s’alourdir (voyez la prochaine crise financière qui s’annonce). Une réforme fiscale radicale qui nous fasse sortir du carcan de l’austérité imposée est donc inévitable[i]. Et le Projet TAN est le seul qui le rend possible.[ii]

Ensuite précisons bien que la déclaration fiscale de notre contribuable sera celle d’une personne physique– l’entreprise ne payera plus d’impôts – et que tout Impôt sur le Revenu a été aboli tandis que la Taxe Foncière, les Droits de Succession et l’ISF ont été remplacés par la seule Taxe sur l’Actif Net – sur le Patrimoine – facile et rapide à calculer : Ce que vous avez,moins ce que vous devez.

Et concentrons-nous sur le cas le plus important de loin de fraude fiscale potentielle, cas où dans sa déclaration – qui n’est autre que son bilan personnel – le contribuable audité a omis de faire figurer un actif, qu’il détient en général à l’étranger, et qui consiste en des actions ou parts d’une entreprise de forme et droit quelconque à vocation lucrative. Il s’agit là du scénario de la grande fraude fiscale, celle qui explique qu’environ mille milliards de recettes fiscales manquent à l’appel dans le monde (70 milliards pour la France.)

Puisqu’il a omis de faire figurer cet actif, il ne figure pas dans son bilan, ce qui en soi ne prouve rien.

Le contrôleur du fisc qui soupçonne une fraude le fait pour d’autres raisons : Il a trouvé la preuve que notre contribuable est actionnaire d’une société de droit étranger, où il possède des parts par l’intermédiaire d’un prête-nom et/ou une ou plusieurs sociétés écran (dont les actionnaires et responsables sociaux sont des personnes de complaisance.) C’est le rapprochement des deux documents (identité des actionnaires de la société étrangère, bilan du contribuable audité) qui constituera la preuve, si bien sûr on peut prouver formellement que les actions de la société étrangère sont bel et bien contrôlées par le contribuable objet de l’enquête. Ces preuves consisteront en des correspondances échangées, des relevés de comptes en banque, des comptes rendus de réunions, des rapports de professionnels divers, des états d’engagements hors bilan, et les textes de témoignages recueillis.

Comme la faute commise par le coupable est constatée dans son dernier bilan, il n’y a en théorie pas prescription possible comme c’est le cas pour l’Impôt sur le Revenu. En effet quand vous avez fraudé dans une déclaration de revenus de l’année 2008, et que la faute est constatée en 2017 après le délai de prescription prévu par la loi (3 à 5 ans suivant les pays) vous ne pouvez plus être sanctionné. Tandis que la fraude à la TAN sera répétée chaque année, puisque chaque année vous persistez à ne pas déclarer l’actif clandestin en question.C’est pourquoi jusqu’à présent nous avons jugé dans tous nos documents qu’il n’y aura, dans les faits, pas de prescription possible pour la fraude à la TAN.

Un juriste suisse membre du Comité Bastille[iii], Thierry Lacroix, nous a démontré qu’une prescription de cinq ans serait amplement suffisante du moment où le délit de fraude à la TAN à caractère malicieux (usage de prête-noms professionnels, volonté manifeste de cacher soigneusement la preuve, etc.) entraînera des peines hautement dissuasives[iv] dès l’instant où, précisément, il aura été constaté que la fraude a été répétée chaque année depuis une date d’origine, laquelle est celle où la société étrangère a été créée, ou bien celle où le coupable aura acheté des actions d’une société déjà existante.

Si l’action frauduleuse a été commise depuis plus longtemps que la période de prescription, elle aura été constatée dans la période la plus récente donc la prescription ne s’appliquera pas, et la peine pourra être suffisamment dissuasive pour avoir pour effet ce que nous souhaitons : Rendre la fraude à la TAN très risquée, très dangereuse, facile à détecter à tête reposée en remontant aussi loin dans le passé que des documents indiscutables pourront être découverts… et ce sera le cas pour la simple raison que des titres de propriété survivent bien plus longtemps que des preuves de revenus dans l’année X ou Y.

A ceci j’ajoute le risque accru qui m’avait été indiqué dans des paradis fiscaux : Un investisseur français qui fraude la TAN sera repéré, ne fut-ce que par les prête-noms et autres précautions qu’il utilise. Ceux qui seront dans la confidence, et il y en aura forcément, considéreront que le bilan de cet investisseur potentiel est encombré d’engagements hors-bilans – sa dette potentielle envers le fisc français – dont le poids augmente avec le temps.

Mais Thierry Lacroix ajoute ceci :

La prescription se justifie en droit pénal général parce qu’avec le temps les preuves de la commission d’une infraction deviennent difficiles : les écrits disparaissent ou deviennent incomplets, les témoins meurent ou ont oublié les faits. Poursuivre des crimes dans ces conditions peut conduire à des erreurs judiciaires, des inégalités de traitement et à l’insécurité juridique. Par ailleurs, les autorités ont le devoir de poursuivre toutes les infractions et leur imposer de suivre toutes les affaires, aussi anciennes soient-elles, revient à leur imposer une surcharge de travail disproportionnée. 

Les partisans de l’imprescriptibilité du délit de la fraude fiscale développent les arguments suivants (voir le site Le Monde.fr du 23.02.2017) : 

Ils soutiennent que l’institution de la prescription n’est pas nécessaire, à tel point qu’elle n’existe pas dans les pays anglo-saxons et scandinaves. Cette affirmation me paraît inexacte: sans procéder à une étude de de droit comparé, l’actualité montre que les poursuites contre Julian Assange en Suède cessent en partie parce que prescrites, et que la Californie envisage la suppression de la prescription en cas de viol. 

Ils constatent que la prescription n’est pas prévue dans la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH) et en concluent que l’imprescriptibilité doit être la règle. Cette conclusion me paraît hasardeuse, car la CEDH n’exclut nullement la prescription et prévoit le droit à un procès équitable, ce qui implique qu’il soit rendu sur la base de preuves solides. 

Ils affirment que la fraude fiscale et les délits financiers importants sont souvent découverts largement après l’échéance des délais de prescription, à l’occasion de changements de régimes politiques ou  de successions. Cette affirmation contient une bonne part de vérité, mais ne résout nullement le problème de la disparition des preuves. 

Ils croient avoir trouvé une solution en prenant pour point de départ de la prescription de l’action pénale le moment de la découverte de la fraude. Cette solution n’en est pas une, car elle revient à réintroduire l’imprescriptibilité pour toutes les fraudes commises dans le passé avant la découverte de la fraude, aussi lointain soit ce passé. Cette solution ne résout donc pas non plus le problème de la disparition des preuves. 

Donc je reste partisan de maintenir l’institution de la prescription dans le cadre d’infractions financières et fiscales, car les arguments des partisans de l’imprescriptibilité ne sont pas convaincants. 

Cet argument est très puissant. Imposer l’imprescriptibilité, c’est inviter tous les juristes du monde à nous accuser d’atteinte à un droit fondamental : Présomption d’innocence tant qu’on n’a pas été condamné dans le cadre d’une justice équitable en raison de preuves indiscutables. 

Thierry Lacroix continue : 

Lors d’une révision récente de son Code de procédure pénale, la France a maintenu que le délai de prescription de l’action publique de l’infraction, publique ou dissimulée, courait du jour où l’infraction est apparue et a pu être constatée dans des conditions permettant la mise en mouvement de l’action publique, sans toutefois que le délai de prescription puisse excéder douze années révolues pour les délits et trente années révolues pour les crimes, à compter du jour où l’infraction a été commise (art. 9-1 CPPFr, entrant en vigueur le 01.09.2017). Pour les autres infractions, le délai de prescription est, en général, en France, de vingt années pour les crimes et de six années pour les délits (art. 7 et 8 CPPFr). Le délai de prescription court à compter du jour où l’infraction a été commise. 

En Suisse (art. 98 ch. 1 du Code pénal Suisse, ci-après CPS), la prescription court : 

  • dès le jour où l’auteur a exercé son activité coupable ; 
  • dès le jour du dernier acte si cette activité s’est exercée à plusieurs reprises ; 
  • dès le jour où les agissements coupables ont cessé s’ils ont eu une certaine durée. 

Quant au délai de prescription, il est de quinze ans si la peine maximale encourue est une peine privative de liberté de plus de trois ans, de dix ans si cette peine maximale est de trois ans et de sept ans si  cette peine maximale est une autre peine (voir art. 97, chiffre 1 CPS). Cette disposition est récente (2013). Je constate qu’en Suisse et surtout en France, les délais de prescription des crimes sont longs, voire très longs et permettent amplement de poursuivre des infractions anciennes. 

Donc, avec des dispositions sur la prescription du genre de celles de la Suisse et de la France ci-dessus, le délai de prescription de l’infraction de fraude fiscale, souvent commis à plusieurs reprises, commencera à courir à partir de la date du dernier dépôt d’une déclaration fiscale frauduleuse. Si le crime ou le délit a été commis à plusieurs reprises, ce sont les dispositions sur le concours d’infractions qui s’appliquent pour fixer la peine. Que ce soit en Suisse ou en France, le concours d’infraction a pour effet d’aggraver la peine. Ce système permet donc de punir toutes les infractions se situant dans le délai de prescription et tient compte de leur caractère répétitif (art. 132-3 du Code pénal français ; art. 49.3 CPS). 

Dans l’exemple que tu donnes, il y aura effectivement condamnation pour les cinq déclarations fiscales frauduleuses comprises dans le délai de prescription de cinq ans. 

Problème de la disparition des preuves dans le système de la TAN : La TAN et un impôt sur la fortune et tu pars de l’idée que sa taxation sera facile parce que la pièce à conviction prouvant la culpabilité de la personne ayant établi une déclaration fiscale frauduleuse est justement cette déclaration qui est une sorte de bilan personnel et que ce dernier, une fois déposé demeure, comme tu dis, « gravé dans le marbre ». On ne saurait nier qu’une déclaration déposée devant les autorités fiscales demeurera à disposition du fisc aussi longtemps que ce dernier voudra la conserver. Toutefois les litiges porteront le plus souvent sur les actifs qui n’auront pas été déclarés ou ne l’auront été que de manière incomplète ou trompeuse et il appartiendra au fisc de prouver que la déclaration est frauduleuse au moyen d’éléments ne figurant justement pas dans la déclaration fiscale. Il est, dès lors, un peu exagéré de dire que la déclaration constitue la preuve de la fraude. Elle n’en est qu’une partie et pas la plus importante, me semble-t-il.

La recherche des preuves d’une fraude par l’administration fiscale demeure difficile et devient aléatoire si beaucoup de temps s’est écoulé depuis la fraude jusqu’au début de l’enquête. Dans ces circonstances, il me paraît que la prescription se justifie.

Conclusion

Une prescription de sept ans pour les actifs taxés à 1,25%, de dix ans pour ceux taxés à 2%, de quinze ans pour ceux taxés a 2,5% et au-delà, nous permettra amplement car elle permettra au législateur le jugement suivant :

Le coupable a persisté dans sa fraude pendant X années consécutives. Ce qui est la preuve de sa malice. Le fisc ne sera pas autorisé à fonder son cas sur l’ancienneté maximale de la fraude. Mais il pourra décréter que, dans un tel cas, la sanction sera toujours la confiscation des biens et une lourde peine de prison ferme.

Et le crime ne payera plus…


[i], [v] & [ix] En 1953 le gouvernement français a de même du adopter TVA pour éviter la défaut de paiement résultant des contrecoups du Plan Marshall, voir notre Livre Blanc La Taxe sur l’Actif Net ou Impôt Progressif sur le Patrimoine Dormant.

[ii] et (vi) Oh, il y a des solutions proposées. Ce sont tous des YAKA : Yaka plus taxer les riches (alors que le capital est déjà taxé quatre fois en France). Yaka réduire les dépenses de l’Etat et réduire le nombre de fonctionnaires (donc augmenter le nombre de chômeurs). Yaka taxer ceci, taxer cela, (alors qu’on a déjà 320 catégories d’impôts et taxes, record mondial). Yaka privatiser (et laisser le marché boursier gérer l’emploi en France, ça ne va pas être triste). Yaka nationaliser (et augmenter encore les dettes de l’Etat.) Yaka supprimer telle aide, telle subvention, tel régime d’assistanat, et encore augmenter les inégalités. Etc. Etc. Etc.

[iii] et (vii) Oui, nous avons des citoyens helvétiques membres du Comité Bastille. En général ce sont ceux qui sont concernés par l’entrée future de la Suisse dans l’UE ce qui est un sujet d’actualité suisse, voyez http://www.europa.ch/a-propos/nomes-suisse/?lang=fr

[iv] et (viii) Je suis bien connecté avec les réseaux Internet classiques. Je suis aussi un des rares qui a une connexion dite transcendante ou métaphysique, qui me permet d’interroger les fantômes du passé. De tous les Rois de France, celui que je respecte le plus est Louis XI parce que, quand il a été sacré Roi, la France sortait de la Guerre de Cent Ans et était dans le trente-sixième dessous, et à sa mort elle était particulièrement prospère, soit l’exact opposé de ce qui lui est arrivé sous Louis XIV. J’ai donc demandé son avis à Louis XI. Il a tout de suite compris le mécanisme de la fraude à la TAN, ayant eu une formation de comptable dans l’Italie de la Renaissance. Il m’a dit : Il faut vous saisir de tous ces escrocs. A ceux d’entre eux qui sont réputés personnes de qualité, vous tranchez la tête. Quant aux manants, vous les pendez haut et court. Et bien sûr vous saisissez leurs biens au profit de la Couronne…J’ai tenté de lui expliquer les arguments de Robert Badinter qui nous ont convaincu d’abolir la peine de mort. Mais ils dépassaient la compréhension d’un monarque de la Renaissance… J’ai donc retenu la prison et la confiscation des biens pour les fraudes dont l’origine est plus ancienne que le délai de prescription. Le législateur tranchera (sans jeu de mots).

Auteur/autrice

  • André Teissier du Cros - AEQUITAE

    Ingénieur-Docteur SupMéca (1958-63). Depuis 1972 dirige un cabinet de stratégie de l’entreprise et dirigeant intérimaire de 3 entreprises aux USA et au Canada. Acteur de soixante rapprochements d’entreprises entre l’Amérique du Nord, l’Europe, le Japon, la Chine, l’Inde, le Moyen-Orient… ; Journaliste économique (1965-71). Ouvrages : Le Courage de Diriger (Robert Laffont, 1969), L’Innovation (Robert Laffont, 1971), Recherche d’Activités et Produits nouveaux (Prix IAE du Management, 1977) ; L’Innovation Malade de l’Impôt (Eyrolles-Ed. d’Organisation, 1980); traducteur-éditeur de The Fifth Rung on Jacob’s Ladder, (Jacques Caubet, Xulon Press, USA 2004). La France, le Bébé et l’Eau du Bain (L’Harmattan 2010). La Taxe sur l’Actif Net ou Impôt Progressif sur le Patrimoine Dormant (L’Harmattan 2016) et nombreux articles et conférences ; Rapporteur du comité ‘Innovation industrielle’ dans la Commission CNPF pour le Développement Industriel, présidée par François Dalle, (1979-81), dont le rapport avait été demandé par Raymond Barre, alors Premier Ministre ; Rapporteur, Commission Nationale pour l’Innovation nommée par G. Pompidou (Commission Barthalon, 1967-71) ; Président (1988-2001) d’une section USA des Conseillers du Commerce Extérieur de la France ; Président Commission Marketing, puis Président, de l’Alliance Française d’Atlanta (2004-2009) ; Président-fondateur du Comité Bastille en 2006 ; Enseignant Georgia Institute of Technology Evaluation Compétitivité Stratégique des Industries Manufacturières (1994-2001) ; Pilote privé FAA (ASEL-IFR) ; Membre (fauteuil 26) de l’Académie des Hauts Cantons

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